Dans les hôpitaux, le nettoyage et la désinfection des chambres sont de plus en plus sous-traités à des prestataires privés, à prix cassé. Ces salariés sous pression, et parfois mis en danger, avaient été écartés du Ségur de la santé.
Nettoyer, assainir, désinfecter, ce sont des tâches essentielles dans un hôpital. Des salariés chargés de ce travail – le « bio-nettoyage » – au sein de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris ont mené plusieurs jours de grève début mars. Ces personnels ne sont pas employés directement par l’hôpital public, mais par des sociétés privées sous-traitantes. Le groupe Challancin vient alors de remporter l’appel d’offres de bio-nettoyage pour six hôpitaux de l’APHP. Les six établissements ont été agités par le mouvement social. Et pour cause : l’entreprise prestataire envisageait des baisses d’effectifs, ainsi que la fin des accords de site – donc la perte de certains acquis.
« Challancin a pris le marché pour un prix très bas, donc il fallait taper sur la masse salariale », explique Malamine N’Diaye, secrétaire général Force ouvrière pour le secteur de la propreté en Île-de-France. À l’hôpital Necker par exemple, sur près de 120 salariés, Challancin souhaitait revenir à 90 postes, « pour faire de la marge », estime le responsable syndical. Conserver les effectifs lors d’un changement de prestataire est pourtant une obligation de la convention collective nationale des entreprises de propreté. Mais il reste possible de jouer sur certaines conditions, et de ne pas prolonger, comme dans le cas de Challancin, des CDD. Suite à la grève, le groupe a fait marche arrière.
Sous-traiter le nettoyage des chambres pour réduire la dette hospitalière
Si certains acteurs comme Challancin se sont lancés il y a vingt ans, le secteur explose vraiment depuis ces dernières années. « Ce phénomène d’externalisation est récent, mais croissant, notamment dans les hôpitaux universitaires », décrit une directrice des finances d’un hôpital, membre du collectif Nos services publics, qui souhaite rester anonyme. Un appel d’offre vient par exemple d’être lancé pour le groupement d’hôpitaux universitaires Henri-Mondor de l’APHP. Les entreprises sous-traitantes du bio-nettoyage des hôpitaux ne se sont jamais mieux portées. Challancin annonce 150 millions de chiffre d’affaires pour cette branche de son activité en 2019 – un chiffre en progression constante depuis 2016, après une stagnation autour de 80 millions.